exposition art / territoire / cartographie automne 2013

  • 10 Juil 14

L’exposition Art Territoire & Cartographie

Cette manifestation organisée conjointement par le bild [bureau d’implantation des lignes Digne] et le Fonds régional d’Art contemporain de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur qui comptera une exposition des œuvres de Nicolas Desplats  et des œuvres de la collection du FRAC : Hélène Agoffroy, Arrangement ; Jean Bellissen, Étang Durand, étangs du Roi, Bouchra Khalili, Mapping Journeys (vidéo), Pascal Simonet, Sans titre ; Stéphane Steiner, Site n°71  ; des conférences de plasticiens : Marine Pagès, Carole Rivalin, et d’un théoricien Guillaume Monsaingeon porte sur les relations qu’entretiennent l’art, le territoire, l’espace et la cartographie.

C’est un vaste sujet qui ne sera ici bien sûr qu’effleuré, la cartographie dès son origine avant qu’elle n’aspire à l’objectivité scientifique et même peut-être dans ce dernier cas a toujours été une projection de l’imaginaire humain sur le territoire, les premières « cartes » chinoises qui se matérialisaient sous forme de rouleaux ou encore les « cartes » des indiens d’Amériques participaient de la déambulation, une vision linéaire, narrative et temporelle du territoire. Elles racontaient par l’entremise de schémas, de tracés et de dessins une histoire et un vécu : celui d’âmes aventureuses qui cherchaient à fixer sur le papier leurs pérégrinations défricheuses, dès l’origine il y a donc eu la volonté de matérialiser par le dessin l’expérience corporelle et se fessant de faire des arts graphiques un partenaire naturel en matière de perception d’espaces et de lieux, comprendre en notifiant, se situer dans l’espace et mesurer ainsi l’incidence de notre environnement sur notre imaginaire, c’est la bien entendu aussi l’un des enjeux majeurs de la création artistique, tout du moins qu’en cette dernière n’est pas trop autocentrée, qu’elle demeure consciente que sa vitalité dépend de sa capacité à aborder l’altérité, ou plus précisément consciente qu’elle se construit au regard de structures et d’environnements qui conditionnent ses affects et sa singularité, les artistes qui ont intégré cette distance s’intéressent inévitablement à la question de l’espace (qu’il soit géographique, social ou politique) et de sa représentation.

Les artistes qui seront présents lors de cette manifestation ne dérogent pas à cette règle, ils envisagent la cartographie et plus généralement la géographie, le paysage, le territoire et l’espace comme des lieux de projection pour l’avènement d’imaginaires fictionnels, lieux de construction de tous les possibles, qui peuvent relever soit d’une expérience sensible du territoire qu’il soit privé ou public, naturel ou urbain ou bien d’une confrontation formelle avec celui-ci, mais dans presque tous les cas, ils dénoncent, en dernière instance, la volonté, toujours renouvelée des structures de pouvoir, afin de rationaliser et de contrôler l’espace et donc de l’organiser et le cartographier

Mais la cartographie aussi précise soit elle, est au territoire ce que la maquette est à l’architecture, elle problématise la question de la représentation et sa relation au réel plus qu’elle ne rend  compte de celui-ci, elle reste dans tous les cas de figure un espace de projection mentale, entre réalité et fiction.

 

Conférences

Carole Rivalin

Plasticienne et directrice de l’école d’arts plastiques de Cholet

 

Mardi 19 novembre 2013 à 18 h 

Salle de conférence de l’école d’art idbl.

 

Prenant pour point de départ le trait et la ligne, Carole Rivalin déploie un ensemble d’œuvres à géométrie variable et aux perspectives changeantes (dessins, sculptures, installations) qui mettent en jeu et en espace plan et volume, surface et profondeur.

Pli et déplie, plein et vide, blanc et couleurs (à l’instar de celles de l’arc-en-ciel) se répondent plutôt qu’ils ne s’opposent. Ainsi, par leur dialogue avec la lumière, les œuvres de l’artiste offrent d’infinies projections et autres ombres portées, composant avec l’espace — qu’il soit d’exposition, architectural, urbain, naturel, — dans lequel elles s’inscrivent et dont elles renouvellent la « vision », incitant le spectateur à une forme de parcours, tant physique que mental.

Diplômée de l’École des beaux-arts de Rennes en 1997, Carole Rivalin a depuis effectué de nombreuses expositions personnelles et collectives en France et à l’étranger, ainsi que plusieurs résidences, notamment à l’Espace de l’Art Concret à Mouans-Sartoux, en 2004.

Concevant des œuvres généralement in situ, elle les inscrit notamment dans le paysage lors de sa participation en 2008 à la manifestation Le Vent des forêts (Palissades) et au Parcours d’art contemporain de Fontenay-le-Comte (Torï). En 2011, c’est dans l’espace urbain nantais qu’elle intervient en entravant partiellement la structure en béton d’un blockhaus au moyen d’un cadre en bois de coffrage (Ça me rappelle quelque chose…).

L’artiste a réalisé un 1% artistique en 2010 au Collège Sophie Germain à Nantes, proposant à cette occasion un dispositif associant passage du temps et colorimétrie qui réunit une projection vidéo et un « agenda perpétuel » (L’Horloge chromatique, ou les couleurs du temps).

Dernièrement, Carole Rivalin a publié sa première monographie aux Éditions amac, intitulée Over the Rainbow.

 

 

Guillaume Monsaingeon

Théoricien

 

Jeudi 21 novembre 2013 à 18 h 

Salle de conférence de l’école d’art idbl.

 

Guillaume Monsaingeon est un spécialiste des relations entre l’art et la cartographie, il est l’auteur d’un ouvrage de référence sur cette question : « Mappamundi » et fut le commissaire de l’exposition : « Mappamundi ou le portrait du monde » qui s’est tenue à l’Hôtel des arts de la ville de Toulon au printemps dernier.

« Depuis cinq siècles, l’occident a élaboré un système cartographique moderne dont ont été expulsés peu à peu les artistes au non d’un savoir neutre et objectif. La terra incognita a disparu, les cartes s’imposent à nous, c’est par elles que nous percevons et pensons le monde. Il est temps que les artistes les reprennent d’assaut, bousculant géographes et informaticiens. Remettant en cause l’idée même de neutralité cartographique, les plasticiens font et défont les cartes et jouent avec le monde »

Guillaume Monsaingeon

 

 

Marine Pagès

Plasticienne et enseignante à l’école supérieure d’Arts d’Aix-en-Provence

 

Jeudi 28 novembre 2013 à 18 h 

Salle de conférence de l’école d’art idbl.

 

L’espace est au cœur des travaux sur papier de Marine Pagès et il est significatif que l’artiste en expérimente physiquement les possibles par le biais de la sculpture, tout en considérant cette dernière comme une extension du dessin. Il faut dire que dans la pratique de la jeune femme, le dessin fait œuvre et qu’il n’est pas réduit au seul projet. D’essence imaginaire, cet espace est synthétisé sous la forme d’un répertoire de fragments architecturaux incorporant des éléments de paysage dans une série de gouaches intitulées Archipaysages (2006-2008). Ici des constructions industrielles multicolores sont envahies par une végétation luxuriante paradoxalement teintée de noir. Si l’inversion des valeurs laisse entrevoir ces hybridations comme les images inquiétantes d’un désastre écologique, elle confère toutefois une dimension ludique à ces architectures anthropomorphisées par le débordement vital des plantes. On retrouve le soin particulier que Marine Pagès apporte, avec des moyens rudimentaires, à ces planches qui parodient la 3D, dans les collages qu’elle exécute depuis 2009. Réalisés avec du papier adhésif imitant le bois, les collages donnent forme à d’étonnantes modélisations architecturales déclinées selon différentes perspectives dans l’espace anonyme de la feuille de papier. Les sculptures en bois recouvertes de placages (2007-2009) sont intimement liées à cette série. Bien qu’elles évoquent parfois des structures cubistes, ces maquettes ne matérialisent pas une utopie oubliée, elles ne font que spatialiser les architectures de papier tout en restant parfaitement impraticables et mystérieuses. Dans ses dessins au crayon (2011-2012), Marine Pagès explore le paysage en faisant table rase de l’architecture. Partant de plans de villes fantômes tracées dans le désert américain, elle fait naître dans la réserve du papier, entre deux plans arides, des routes qui se déploient à perte de vue. De ces villes invisibles, dont on ne sait si elles ont été construites un jour ou si elles ont été abandonnées, il ne reste qu’un impalpable réseau routier dont la virginité contraste avec la végétation rase et nerveuse qui parcourt le sol. Cette géométrie pure appliquée au paysage n’est pas sans convoquer certaines œuvres du land art depuis A mile long drawing de Walter de Maria dessiné à la craie dans le désert Mojave de Californie en 1968, jusqu’aux Time Lines tracées dans la neige de Dennis Oppenheim. Ici le désert se dissout dans sa propre représentation, ses contours s’évanouissent tantôt vers les bords du support, tantôt vers la ligne d’horizon, à la manière d’un mirage.

Catherine Macchi, 2012